L’intégration des compétences en développement durable de l’école à la formation des cadres

Les défis environnementaux, économiques et sociaux auxquels les cadres, les professionnels et les décideurs politiques européens sont actuellement confrontés se caractérisent par leur multi-dimensionnalité, leur interdépendance et leur urgence. Même si ces questions contemporaines instables, incertaines, complexes et ambiguës (VUCA) sont reconnues par les hauts dirigeants, comme l’a montré le Rapport sur les risques mondiaux 2019 [1], le paradigme actuel de la formation en gestion et de la gestion des affaires reste axé uniquement sur la valeur actionnariale. Il est donc important de développer un modèle européen de leadership et de gestion durables. L’engagement de l’UE vis-à-vis des objectifs de développement durable, la mise en œuvre de l’accord de Paris et divers autres objectifs de la Commission européenne et du dialogue social exigent une action au niveau opérationnel, y compris sur le lieu de travail.

Lorsqu’on parle de durabilité, les dimensions environnementale, sociale et économique sont souvent différenciées. Cependant, il existe également une composante procédurale qui apporte une réponse matérielle à ces questions. Comme le soulignent les concepts d’environnement, de société et de gouvernance (ESG), il convient également de mettre l’accent sur la manière dont les entreprises évoluent vers un modèle économique plus adapté aux intérêts financiers. Une modification du modèle de gouvernance /de gestion des entreprises est donc essentielle pour progresser concrètement vers un modèle socio-économique durable.

Un paysage clairsemé en matière de gestion de la durabilité

Selon un sondage McKinsey [2], peu d’entreprises ont aujourd’hui une stratégie de développement durable coordonnée et plus rares encore sont celles qui ont pris des mesures. Les préoccupations en matière de durabilité restent souvent une préoccupation départementale au sein des entreprises et elles ne sont que rarement intégrées aux fonctions opérationnelles essentielles telles que la stratégie et la R & D [3]. Généraliser les questions de développement durable dans la vie de l’entreprise peut non seulement améliorer les performances ESG, mais aussi avoir un impact financier positif sur ces entreprises [4].

Outre la mise en œuvre limitée de stratégies et de mesures de durabilité, celles qui existent ont tendance à suivre une logique « incrémentaliste » [5]. Autrement dit, les mesures des progrès en matière de durabilité (telles que définies dans les rapports non financiers) d’une entreprise ne font que comparer les données d’une année sur l’autre et ne s’alignent pas sur des objectifs ou des cadres stratégiques plus larges. Étant donné que les mesures ESG restent souvent réservées aux départements de développement durable [6] et que le contexte et la longévité des mesures de développement durable sont souvent laissés de côté, la logique systémique du changement vers un système économique plus durable semble avoir été négligée.

Parallèlement à la notion d’ESG, la responsabilité sociale des entreprises (RSE) a guidé les efforts de réorientation des activités opérationnelles et celle-ci s’est également été reflétée dans la stratégie de la Commission européenne sur la RSE pour la période 2011-2014 [7]. Tenant compte de l’accélération des défis environnementaux et de la connotation de l’aspect « c’est bien d’avoir» de la RSE et des liens entre dimensions de la durabilité, l’idée d’un «triple résultat final» (TRF) des entreprises est apparue. En mesurant et en valorisant divers types d’actifs (économiques, sociaux, environnementaux), il est possible d’améliorer les performances sur les trois dimensions de la durabilité. Développer des compétences de gestion pour atteindre ce triple résultat pourrait donc contribuer à améliorer les principales mesures de performance en matière de développement durable. Pour ce faire, la CEC appelle à une meilleure formation continue des cadres en intégrant activement la durabilité dans les programmes.

 

Références:

[1] http://www3.weforum.org/docs/WEF_Global_Risks_Report_2019.pdf

[2] https://www.mckinsey.com/business-functions/sustainability/our-insights/sustainabilitys-strategic-worth-mckinsey-global-survey-results

[3] https://www.mckinsey.com/business-functions/sustainability/our-insights/sustainabilitys-deepening-imprint

[4] Ibid.

[5] https://www.bsl-lausanne.ch/wp-content/uploads/2015/04/Dyllick-Muff-Clarifying-Publ-Online.full_.pdf

[6] https://www.csreurope.org/sites/default/files/uploads/State%20of%20the%20Profession%202018%20Report.pdf

[7] https://eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/?uri=CELEX:52011DC0681